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Par Julien Lefevre, cofondateur de Chauffage Au Bois.fr et directeur de la publication de chauffage-au-bois.fr
Infos secteur
26/09/14

Anoribois: l’interprofession donne un avis objectif sur la filière bois

chauffage-au-bois.fr revient cette semaine avec l’interview d’Olivier BOULAY , Directeur d’ Anoribois. Découvrez la marque France Bois Bûche, ainsi que ces déclinaisons régionales qui sont au service des acteurs du secteur bois.


Pouvez-vous vous présenter, et parler un peu de votre parcours professionnel ?

Je suis Olivier BOULAY, le Directeur d’Anoribois, l’interprofession forêt bois de la région Haute-Normandie. De formation, je suis ingénieur ESB (Ecole Supérieure du Bois). Je suis à Anoribois depuis 15 ans environ où j’ai démarré en tant qu’ingénieur. Cela fait maintenant 10 ans que j’en ai pris la direction.


Pouvez-vous présenter Anoribois, ses activités et ses objectifs ?

Anoribois est une interprofession de la filière bois. Les adhérents représentent l’ensemble des professions de la filière bois. Cela va de l’amont (les propriétaires forestiers) jusqu’à l’aval (l’utilisation du bois sous toutes ses formes : ébéniste, charpentier,…).

Le rôle d’Anoribois est de contribuer au développement économique de la filière bois à l’échelle de la région. Nous sommes présents pour apporter des aides et conseils aux entreprises ; monter des actions collectives s’il y a des sujets ou des thématiques qui le méritent, qui sont assez fédérateurs pour que nous regroupions des entreprises pour cela. Il s’agit de la première mission : le développement économique.

La deuxième mission : nous sommes un lieu d’échange entre tous les organismes de la filière, et donc un lieu de décision des politiques régionales sur la filière bois. On est également le porte-parole de la filière au niveau des Pouvoirs Publics (région, département..) pour justement mettre en application ces politiques et trouver des financements publics qui permettent de les mettre en œuvre.

Au niveau de notre troisième rôle : on s’occupe de tout ce qui est promotion du matériau bois et des métiers du bois auprès du Grand Public ou des maitres d’ouvrages pour leurs différents projets. On fait pas mal d’actions de communication ; on participe à des salons ; on fait des portes ouvertes de bâtiments bois, des expositions… Et notre dernier rôle : on essaye de suivre l’appareil de formation aux métiers du bois dans la région pour veiller à ce qu’il y ait une adéquation entre les besoins des professionnels et l’offre de formation.


Vis-à-vis de vos activités, avez-vous des partenariats ?

Oui. Nous sommes une petite équipe de quatre personnes, on travaille donc en relais et en partenariat avec d’autres organismes, que ce soit avec les adhérents ou avec les syndicats professionnels directement ou alors d’autres structures un peu proche de la nôtre comme Biomasse Normandie sur la partie bois énergie, etc…


Il n’y a aucune concurrence entre vous ?

Nous ne sommes pas tout à fait sur le même champ. C’est-à-dire qu’être généraliste et s’occuper de toute la filière bois nous sommes les seuls à faire cela. Les autres organismes ont soit une partie de la filière ou alors ils sont plus sur un aspect, ou si ce sont des syndicats ils sont plus sur les rôles de défense de leur profession.

On a chacun notre rôle défini.


Chaque interprofession est rattachée à une région. Avez-vous un contact privilégié avec les autres interprofessions ?

Nous sommes tous membres de l’association France Bois Régions, une structure qui englobe l’ensemble des interprofessions régionales. Cela nous permet de travailler ensemble ; de monter des actions mutualisées. On travaille ensemble sur diverses actions comme Le prix national Construction bois, par exemple. C’est une action qui est présente dans presque toutes les régions de France. Après il y a des actions un peu plus ciblées. Par exemple, en ce moment il y a une action sur le châtaigner. Donc tout le monde n’est pas concerné par cette action. Il y a deux niveaux d’actions.


Travaillez-vous avec les particuliers ?

Nous sommes là pour orienter les particuliers. Soit sous la forme de salons publics pour renseigner les gens, les orienter, mais également par contact téléphonique où nous avons pas mal d’appels de particuliers, notamment sur le bois de chauffage. Ils recherchent souvent des fournisseurs, et nous les renvoyons vers les adhérents de la marque Normandie bois bûche.


Pourriez-vous détailler deux évènements dont vous êtes à l’origine : Les Rencontres Maison Bois et le Salon Maison en Bois ?

Le Salon Maison en bois est un salon qui a lieu tous les ans au mois d’octobre, au parc d’exposition de Rouen. Cette année ce sera du 10 au 13 octobre. Dans le cadre des salons maison déco de Rouen, plusieurs salons sont dans ces thèmes : habitat, bois, immobilier (au niveau du bois). Des exposants professionnels tournent autour de la maison bois, de la construction bois : des charpentiers, des fournisseurs de matériaux, etc…

Pour ce qui est d’Anoribois, nous avons une partie animation et exposition où on accueille le Grand Public pour leur expliquer les avantages de la filière, l’aspect forestier, l’aspect fournitures de bois. En parallèle nous faisons également des conférences Grand Public, des expositions. On invite aussi les centres de formation de la région à venir faire des démonstrations pour que les gens voient concrètement ce que représente le travail du bois, et éventuellement susciter des vocations.


Ces salons rencontrent-ils un nombre croissant de visiteurs chaque année ?

La demande est toujours présente malgré la crise. Le visitorat est présent tous les ans. Nous voyons tout de même des différences : au niveau de la construction bois, les gens n’ont pas les mêmes attentes qu’il y a dix ans. C’est-à-dire qu’actuellement ils voient à peu près de quoi il s’agit.

Ce qui n’était pas le cas il y a dix ans. Ils n’ont plus de questions de néophytes mais plutôt des points un peu plus concrets qu’ils souhaitent aborder.


Les deux évènements sont ciblés particuliers et professionnels ?

Ce sont plus des évènements orientés Grand Public. Les Rencontres Maisons Bois, il s’agit de portes ouvertes de maisons en bois ou d’agrandissement en bois. Nous contactons les entreprises et les architectes pour qu’ils nous orientent vers leurs clients qui ont déjà construit et qui sont prêts à ouvrir leur maison. Le but est d’inviter des particuliers qui ont un projet, pour qu’ils voient de leurs propres yeux des constructions en bois. Sur les salons on peut voir des photos, mais on ne peut pas toucher, se rendre compte… Ce n’est pas la réalité. Lors de ces rencontres, il y a l’échange avec le propriétaire, l’entreprise et l’architecte.


Chaque année vous arrivez à développer ces évènements ?

Sur le salon on essaye de trouver un thème différent avec des conférences et autres animations appropriées. Cette année, par exemple, vous pourrez voir une exposition sur « l’ensemble des possibilités d’utilisation du bois local dans l’habitat. »


Pouvez-vous nous parler des outils que vous avez conçu ? (Le référentiel construction bois et l’annuaire professionnel E-Boisic) A quoi servent-ils exactement ? Et sont-ils bien utilisés ?

L’annuaire professionnel est un annuaire qui est en ligne sur notre site Internet. Une édition papier est également imprimée tous les deux ans. C’est-à-dire que tous les deux ans on réenquête l’ensemble des entreprises de la région pour connaitre leurs évolutions, intégrer les nouvelles entreprises, enlever les entreprises qui n’existent plus, etc… Cela nous permet d’avoir une vitrine un peu commune pour permettre aux clients de nous trouver. Et cela marche bien, on le voit au niveau de la consultation du site : c’est vraiment la partie du site qui suscite le plus de visite.

Cela marche essentiellement avec des particuliers qui cherchent un produit ; qui cherchent à refaire une charpente, une menuiserie, etc… Après il y a un autre aspect qui marche peut-être moins sur Internet et plus avec l’édition papier : c’est la création de liens entre entreprises en termes de sous-traitance et de recherche de fournisseurs.

Pour ce qui est du référentiel construction bois, c’est un outil qui est présent depuis longtemps. A l’origine, il était porté par le CNDB et était décliné dans les différentes régions.

Maintenant, il prend la forme du « prix national de la construction bois ». C’est à dire qu’avant il y avait une base de données nationale référencée bois construction qui était porté par le CNDB. Aujourd’hui, on réalise la même chose mais à partir du site « prix national de la construction bois ».

Le but étant de s’en servir à la fois comme vitrine des projets qui ont gagné le prix tous les ans mais également de base de données avec tous les candidats qui auraient pu prétendre au prix national.

Au final, cet outil sert encore une fois aux maîtres d’ouvrage qui ont un projet. Cela permet de se rendre compte de ce qui est réalisable en bois sur les différents ouvrages. En parallèle, cela permet de mettre en relation les professionnels. C’est-à-dire qu’à chaque fois l’architecte, l’entreprise sont mentionnés. Donc si on a repéré une maison dont l’architecture nous plait, derrière on a la possibilité de contacter l’architecte.


Le prix dont vous parlez est bien le Palmarès de la construction bois ?

Effectivement. Il existe deux niveaux : il y a un prix national qui est remis tous les ans généralement au salon Maison Bois d’Angers, fin septembre - début octobre. Et le niveau en-dessous est un système de prix régionaux. Par exemple, nous, tous les deux ans, nous décernons un prix régional. Les candidats peuvent se présenter pour les deux prix.

Pour les prix classiques, la meilleure maison bois, le meilleur habitat collectif, etc… c’est un jury de professionnels professeurs d’école d’architecture, architectes, maîtres d’ouvrage publics) qui attribue les prix.

Pour le Prix du Jury, c’est différent. C’est au tour du Grand Public de voter (le plus souvent à l’occasion du salon maison bois).


Pouvez-vous nous présenter l’Observatoire forêt bois ?

L’objectif est de diffuser des informations aux différentes entreprises, mais avant tout aux Pouvoirs Publics, aux collectivités, etc… C’est un recueil de tout ce qu’on peut retrouver sur la filière bois en un lieu unique. On se charge de collecter toutes les données à la fois économiques, sur la formation, sur les éléments législatifs, les arrêtés et décrets, etc…

On centralise toutes ces données pour faciliter les recherches sur ce secteur. Le but est aussi de définir des actions, des politiques grâce à ces informations.


Au niveau du certificat PEFC, vous en parlez sur votre site. Pourquoi ne pas parler des autres certificats existants ?

On en parle parce qu’on s’est engagé vraiment très tôt sur les certificats PEFC à la demande des entreprises. On a été l’une des premières régions avec la Bourgogne à se lancer sur ce certificat. Nous n’avions pas le choix, les forêts européenne et française se sont lancées sur la certification PEFC qui est sans doute la plus adaptée à la structure de la forêt française. Si on devait la caractériser : une surface forestière moyenne très faible, une multitude de propriétaires forestiers.

On ne pouvait pas se permettre de certifier des forêts de façon individuelle, on opte donc pour une approche plus collective par région avec un engagement individuel des propriétaires derrière qui veulent adhérer à la démarche. Et puis, la filière française porte vraiment le système PEFC de manière assez forte. A tel point qu’on a eu très récemment des demandes sur un autre système de certifications de la part d’entreprises : FSC. Mais nous sommes coincés parce qu’en France il y n’y a pas ou très peu de forêts certifiées FSC. Donc si nous n’avons pas l’approvisionnement de départ sur FSC, on ne peut pas déclencher une traçabilité ou des chaînes de contrôle sur FSC. Donc pour l’instant ça ne fonctionne pas.

En France, vous avez des forêts PEFC. Pour nous, c’est plus de 50% de la forêt normande qui est certifiée PEFC. Au niveau national, ce sont entre 30 et 40% des forêts françaises qui sont certifiées PEFC.


Vous pensez qu’à l’avenir vous pourrez travailler sur FSC ?

Oui, mais il faudrait que la partie forestière s’intéresse à cette certification, et que l’on arrive à augmenter le pourcentage de forêts certifiées FSC pour avoir une offre FSC.


Et, selon vous, d’où vient ce blocage ?

A mon avis, c’est un peu la crainte de voir FSC devenir vraiment hégémonique si des propriétaires forestiers commencent à choisir cette certification. La demande mondiale est plus FSC, ce qui peut vraiment créer un appel d’air important. Ainsi, on pourrait craindre de voir s’installer le monopole de FSC. Le propriétaire forestier pourrait y perdre sa liberté s’il n’y a qu’un seul système.


Proposez-vous des formations ?

Non, pas directement. Nous ne sommes pas un centre de formation, mais par contre nous travaillons avec les centres de formations de la région : aussi bien formations initiales que formations continues ou par apprentissage. Et puis, si on détecte un manque, on travaille avec eux pour mettre en place un module pour combler le manque.


Les formations ciblent-elles tous les acteurs du marché ?

Cela dépend. Là nous avons lancé une formation « bûcheron adulte », par exemple. Nous avons lancé une formation pour les affûteurs et les ouvriers des scieries l’année dernière. Et nous allons bientôt lancer une formation sur les bonnes pratiques sur les chantiers forestiers en lien avec l’environnement justement.


On a vu arriver le nouveau Crédit d’impôt, est-ce que, selon vous, cela va affecter votre secteur d’activité ?

On espère toujours. Ce sont des mesures qui sont censées orientées l’activité sur différents marchés en les poussant. On a vu ça très clairement sur le bois énergie, par exemple, où le crédit d’impôt sur les équipements de chauffage à énergie renouvelable ou plus performant couplés à des aides et subventions des collectivités locales, département, région… On voit bien que l’investissement des foyers français dans des poêles à bois à exploser grâce à cela.


Allez-vous vous préparer à cette explosion de la demande ?

On suit toutes ces démarches là pour être en mesure d’informer les particuliers, les clients potentiels… On a plutôt un rôle de conseil là-dessus. En parallèle on peut porter des formations.

Sur le bois énergie, on n’est pas en capacité, de dire « il faut produire plus ». On peut alerter mais on ne peut pas décréter que, si demain la consommation double, on sera en capacité de produire beaucoup plus.


Que pensez-vous de l’éco-conditionnalité ?

Il faudra voir à l’usage. Cela part d’un bon sens, il vaut mieux faire réaliser ses travaux par une entreprise compétente qui sait de quoi elle parle. Encore faut-il que la certification soit vraiment valable. Par exemple, il ne suffit pas d’avoir une certification Qualibat pour être le « champion du monde de la pose de parquet » ou je ne sais quoi. Parfois, la capacité d’une entreprise est mal exprimée à travers ces qualifications. Et parfois c’est un peu plus de la communication que la réelle valeur de l’entreprise. Il faudra vraiment voir sur quoi est basée l’obtention de cette marque.


Ne craignez-vous pas que les petites entreprises soient lésées et soient obligées de fermer ?

En effet, cela peut aussi être un frein pour l’entreprise si cela se généralise. Nous l’avons vu sur le chauffage au bois avec le label Qualibois. A partir du moment où la région utilisait le label Qualibois avec les installateurs pour que le particulier ait sa subvention de la région. C’est la première chose que demande le particulier à l’installateur. Et l’installateur qui ne l’avait pas perdait le marché. Donc oui, cela va sûrement être un frein pour les entreprises.

Après, obtenir la certification RGE n’est pas si compliqué que cela. Cela ne me parait pas être insurmontable.

Quel est selon vous la clé de la réussite d’Anoribois et des interprofessions en général ?

Si nous arrivons à répondre aux besoins des professionnels ; à recueillir leurs souhaits, et ce qui pourrait les faire progresser ; à trouver des moyens d’action pour répondre à ces besoins. Le but est avant tout de développer la filière, d’une part, et d’augmenter le recours au bois local parce que nous sommes tout de même là pour travailler sur un territoire. Si la construction bois se développe mais qu’il s’agit de bois provenant de Suède ou du Canada, cela aura beaucoup moins d’intérêt pour nous.


Quel est l’avenir de votre secteur, d’après vous ?

Il devrait être plutôt favorable, nous avons le vent en poupe. Nous sommes la première énergie renouvelable avec le bois énergie ; Nous avons un matériau pour la construction qui est performant et qui stocke le carbone. Cela permet entre autre de lutter contre le changement climatique en réduisant les gaz à effet de serre. Et, pour cette raison-là, les Pouvoirs Publics portent la filière de façon très significative. Nous avons des politiques publiques qui vont dans le bon sens pour nous : la filière bois fait partie des 34 plans industriels du redressement productif ; la loi d’avenir forestière qui vient de sortir ; les plans d’actions qui ont été pris dans chaque région ; etc…


De grands groupes arrivent sur le marché comme Total, est-ce que cela pourrait représenter une menace sur le long terme ?

On peut avoir des phénomènes de concentration, de gros opérateurs qui arrivent. C’est sûr que cela peut être un problème pour les petits acteurs qui pourraient être écrasés. Quoiqu’ils ne seraient peut-être pas les plus menacés : les petites entreprises sont sur les marchés très locaux avec une clientèle d’habitués, donc ce n’est pas eux les plus menacés. Ce sont plutôt les structures intermédiaires qui sont suffisamment grosses pour être sur des marchés un peu plus importants, et face à des groupes internationaux ils ne peuvent pas lutter et disparaissent.

Cependant, il faut également prendre en compte que nous sommes sur une filière qui est un peu compliquée. C’est extrêmement diffus et morcelé. Le bois, il faut quand même aller le chercher en forêt.

Et puis, en ce qui concerne les grands groupes présents sur le bois énergie, nous les avons déjà depuis plus de 10 ans (GDF Suez, Véolia etc…), et pour l’instant ils ne progressent pas très vite avec notre forêt très morcelée, nos millions de propriétaires forestiers. Ce n’est pas une filière qui est si simple à aborder par les grands groupes.

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