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Par Julien Lefevre, cofondateur de Chauffage Au Bois.fr et directeur de la publication de chauffage-au-bois.fr
Infos secteur
12/09/14

La performance énergétique du bâtiment selon Effinergie

Cette semaine chauffage-au-bois.fr vous présente l’entreprise Effinergie à travers les yeux de Sébastien Lefeuvre, chargé de mission de l’Observatoire BBC. Découvrez cette association, ainsi que ces quatre labels de qualité.


Pouvez-vous vous présenter rapidement, et résumer votre parcours professionnel ?

Je suis chargé de mission au sein de l’association Effinergie pour l’Observatoire des Bâtiments Basse consommation*.

J’ai un parcours scientifique: faculté et Ecole d’ingénieur. Cela m’a permis de travailler pendant 10 ans dans l’industrie électronique Grand Public, ainsi que dans l’automobile.

En 2009, j’ai fait une reconversion professionnelle. Je travaillais dans la qualité et l’environnement, et j’ai fait une reconversion professionnelle en faisant un Master de Management de l’Energie à l’INSA, à Lyon.

Suite à cela, j’ai souhaité travailler plus spécifiquement dans l’énergie et dans le bâtiment, et quitter le secteur industriel pour découvrir le milieu associatif. J’ai, dans un premier temps, travaillé dans une association sur Lyon en tant que stagiaire. Durant 6 mois, j’ai fait du management de l’énergie et de l’environnement. Et, dans le cadre de cette association, j’ai trouvé le poste chez Effinergie. Cela fait maintenant 4 ans de cela.


Pourquoi cette reconversion professionnelle ?

En 2009, j’ai constaté que j’étais dans un secteur industriel impacté par la crise économique. J’ai souhaité mettre en adéquation mes valeurs personnelles et mon parcours professionnel. Ainsi, je me suis réorienté vers l’environnement, et plus spécifiquement vers l’énergie, un enjeu important pour les années à venir.


Qu’est-ce qu’Effinergie ? Quelles sont ses activités ?

Effinergie est une association. Créée en 2006, elle a pour objectif de développer, sur le marché de la construction et de la rénovation, une dynamique territoriale sur la généralisation des bâtiments confortables et performants d’un point de vue énergétique. Le contexte était le suivant : on était au lendemain de la publication de la RT 2005, une évolution en termes de réglementation.

A l’étranger, des expériences étaient déjà menées ; dans certaines régions de France, des initiatives régionales sur des bâtiments, qui consommaient moins que le niveau réglementaire, étaient lancées. A partir de là, un certain nombre d’acteurs (Cf. nos membres fondateurs) ont mené des réflexions afin de définir la basse consommation en France, et ont créé notre association.

Nos membres fondateurs sont issus de différents secteurs tels que le milieu associatif, le milieu bancaire, les régions de France, etc… De plus, nous avions le CSTB* qui intervenait comme « caution scientifique », alors que le collectif « Isolons la Terre », était également membre de l’association.

Nous orientons notre activité suivant trois axes : l’animation de réseaux, la définition de label, la mise à disposition et la création d’outils pédagogiques pour pouvoir accompagner la filière.

Ces outils passent par la création de guides, l’agrément de formations, et puis surtout par l’Observatoire des Bâtiments Basse consommation.


Vous êtes-vous heurté à la concurrence ?

En 2006, le fait que l’on soit précurseur sur la construction basse consommation, et qu’il n’y ait que très peu d’acteurs sur cette dynamique-là, nous ne nous heurtions pas particulièrement à la concurrence.

Ce sont vraiment les membres fondateurs qui ont travaillé sur le déploiement de nos labels, avant tout en s’appuyant sur notre assise territoriale (20 régions de France sont membres de l’association).

Cette assise nous permet de tester et de déployer nos nouveaux labels à travers des appels à projets régionaux pilotés par les régions de France et les directions régionales de l’ADEME.


Avec qui travaillez-vous ? Prenez-vous en compte les particuliers ?

Avec qui travaillons-nous ? Avec nos membres (à peu près 70 membres, à l’image des membres fondateurs : des associations, des organismes, des collectivités, etc…). Nous travaillons également avec des institutions telles que le Ministère de l’énergie, le Ministère du logement, la DHUP*. Nous collaborons avec d’autres réseaux associatifs qui sont dans le même secteur que nous.

Notre but est d’avoir un consensus autour des acteurs du métier, autour de nos labels.

Pour la création et l’écriture de nos labels, on ne travaille pas avec les particuliers, mais on reste cependant à leur écoute. On a créé le label BBC-effinergie en 2006. Cette année-là on était tellement précurseur qu’on n’avait pas de retour des particuliers. Aujourd’hui, grâce à nos labels et à l’observatoire bbc, on est à l’écoute des retours terrain qu’on peut avoir au travers des maîtres d’ouvrages, des constructeurs, des bureaux d’études, des architectes, des organismes certificateurs qui relaient aussi les difficultés qu’ils ont pu avoir lors de la mise en œuvre de nos labels.


Vous proposez des formations. Pouvez-vous nous en dire plus ? A qui sont –elles destinées ?

Un point important : Effinergie n’est pas un organisme de formation. Nous donnons un seau de qualité aux formations qui nous sont communiquées sur la base du volontariat par des organismes de formation. Celles-ci sont évaluées par une commission qui constate si les référentiels de formation sont en adéquation avec les référentiels de nos labels, et plus largement avec des démarches d’efficacité énergétique du bâtiment. On agrée soit des formations initiales, soit des formations continues longues ou courtes. Sur cet aspect nous allons toucher tous les types de publics.

Jusqu’à aujourd’hui, nous ne faisons pas de prospection commerciale, c’est plutôt par réseaux ou par « aura » que les organismes de formation viennent nous proposer leurs référentiels.


Pouvez-vous nous présenter vos labels ? Quelles sont leurs différences ?

Il y a quatre labels : 3 dans le neuf et 1 dans la rénovation.

Ce qu’il faut retenir de nos labels, c’est qu’ils sont cohérents avec les réglementations thermiques. C’est-à-dire qu’on se base sur les méthodes de calcul de la réglementation thermique. Nous prenons ainsi en compte les usages réglementaires (chauffage, eau chaude, éclairage, etc…).

Pour la rénovation, nous avons le BBC Effinergie rénovation. Pour atteindre le « facteur 4* », on va fixer un objectif de 80 kWhep/m² shon au niveau national (l’énergie primaire par m²). A noter que cet objectif est pondéré par l’altitude, ainsi que par la zone climatique puisqu’il y a plus ou moins de difficulté à atteindre ce niveau.

Dans le neuf, historiquement nous avons trois labels.

Lorsque la réglementation thermique 2005 était en application (jusqu’au 31 décembre 2012), nous avions le label BBC-Effinergie, le label qui nous a fait le plus connaitre. Le principe était le même : nous étions sur le modèle de calcul de la RT 2005, nous prenions en compte les mêmes usages que la rénovation. Cependant au lieu d’atteindre le 80 kWhep/m² shon, il s’agissait de 50 kWhep/m² shon pondéré par les deux coefficients altitude et zone climatique. Depuis que la réglementation thermique 2012 est en application, il n’est plus délivrable puisqu’il était basé sur l’ancienne réglementation.

Heureusement, nous avons su anticiper la sortie de la RT 2012, et nous avons créé deux nouveaux labels : d’abord, Effinergie +, puis Bepos Effinergie en 2013.

Ce qu’il faut retenir sur Effinergie +, c’est qu’en termes de performance du bâtiment on est sur des niveaux 20% inférieurs au niveau de la réglementation thermique 2012.

La réglementation thermique 2012 se caractérise, entre autres, par deux coefficients : le Bbio pour l’enveloppe du bâtiment et le CEP pour la .consommation. En ce qui concerne le label effinergie+, l’objectif est d’atteindre un niveau de performance 20% inférieur par rapport à ces deux critères.

En plus de cela, le label Effinergie+ impose un niveau d’étanchéité à l’air du bâtiment plus performant. Cependant, cette exigence nécessite une vigilance accrue sur la qualité de l’air intérieur du bâtiment.

A cela s’ajoute une nécessité de s’assurer que les réseaux de ventilation ont de bons débits et sont bien étanches. C’est la raison pour laquelle on impose aussi la mesure d’étanchéité à l’air des réseaux de ventilation.

A noter que d’autres progrès liés à la performance du bâtiment sont introduits sur ce label. En effet, nous préparons les futurs habitants aux bâtiments Bepos en leur disant : « Attention, aujourd’hui on ne s’est focalisé que sur les cinq usages réglementaires. Commençons, par exemple, à prendre en compte les évaluations des consommations mobilières et autres usages. C’est-à-dire les consommations liées aux médias (télévision, internet..), l’électroménager, etc…

A travers cela, on souhaite montrer aux gens que plus on réduit les consommations sur les bâtiments, plus les autres consommations deviennent importantes.

Aujourd’hui, pour une maison individuelle, les cinq usages réglementaires représentent 50 kWhep/m² shon mais les autres consommations (ex : média) peuvent varier de 50 à 70 kWhep/m² shon. On peut donc constater que la part des autres usages devient autant, voire plus importante que la part de ce qu’on suivait aujourd’hui. La sensibilisation devient donc nécessaire.

Enfin, des recommandations concernant ce label existent : inciter les gens à regarder l’énergie grise ; à regarder les consommations liées au déplacement des utilisateurs du bâtiment.

Enfin, nous avons le label Bepos. Il va au-delà de l’Effinergie +. Le prérequis, c’est de dire que le bâtiment Bepos doit être un bâtiment Effinergie +.

Ensuite, un bilan en énergie primaire non renouvelable va être effectué, puis va être comparé à un écart théorique. Concernant les bilans ou les écarts, la formule reste la même : Consommation non réglementaire + Consommation des usages non spécifiques – Production d’électricité. On dit également que Consommation – Production doit être inférieur à un écart théorique qui dépend de la zone climatique et du bâtiment (nombre d’étages, usage du bâtiment) que vous avez.

Concrètement : si vous êtes dans le nord ou dans le sud vous n’avez pas le même ensoleillement. Et si vous êtes de plein pied ou à étage, l’écart théorique en sera modifié également.

Pour résumer : les labels se basent sur la réglementation en vigueur, mais ils vont au-delà de la réglementation. Ces labels sont des labels énergétiques mais ils sont délivrés dans le cadre de certifications qui ont un domaine plus large car chaque label est délivré par un organisme de certification.


Qui se charge du contrôle ?

L’association n’effectue pas de contrôles, on a des conventions avec des organismes certificateurs. Ils sont chargés de l’instruction des dossiers, du suivi, et de s’assurer qu’il y ait un respect des référentiels liés au label Effinergie.


Est-ce que vos labels pourraient être substituables à d’autres labels existants ?

Notre label est une démarche volontaire. Les normes peuvent être volontaires ou imposées, et donc traduites en textes réglementaires (ex : amiante, plomb). Ceci est un point important.

Notre label concerne un bâtiment, il ne va pas concerner une solution technique. On ne peut pas trouver un poêle à bois Effinergie plus, par exemple. C’est le bâtiment en soit qui va être labellisé. Nous ne sommes pas en concurrence avec Flamme verte, par exemple.

Enfin, d’autres labels existent, mais ces labels ont des seuils et des périmètres différents.


Quelle reconnaissance pour vos labels ?

Pour le label BBC Effinergie, il a clairement inspiré la RT 2012. Si aujourd’hui on prend des chiffres : en termes de demandes BBC Effinergie, on est sur plus de 600 000 logements : 500 000 en logements collectifs et 100 000 en logements individuels. En tertiaire, on a plus de 6 millions de m² de tertiaire en cours de demande.

En ce qui concerne Effinergie +, on a plus de 12 000 demandes de logements. On a fait un comparatif des courbes d’évolution du nombre de dépôt de dossier de certification en prenant comme référence la date de publication du label. A ce jour, les courbes se superposent.

Par contre, le label BBC, quant à lui, a bénéficié de la reconnaissance de l’Etat et de la loi Scellier. C’est ce qui avait fait « explosé » le label. Sur le label Effinergie +, nous ne sommes pas pour l’instant sur cet objectif-là. L’Etat n’a pas encore publié de label lié à la réglementation thermique 2012. Pour ce qui est du label environnemental, il est en cours de réflexion.

Donc la reconnaissance au niveau du secteur est claire.


Un nouveau Crédit d’impôt va voir le jour, est-ce que cela va affecter votre secteur ? Avez-vous constaté une évolution au niveau des demandes ?

Des annonces ont été faites indiquant que le crédit d’impôt pourrait être octroyé pour un seul type de travaux. Avant, il concernait davantage un groupement de travaux différents.

Pour nous, il s’agit d’atteindre le facteur 4. Soit de l’atteindre en une seule fois en faisant un bouquet de travaux, soit de le faire par étapes mais d’avoir de la cohérence dans les travaux que vous enchaînez.

En conséquence, donner un crédit d’impôt pour un seul type de travaux ne va pas forcément favoriser le bon séquençage des travaux. Pour nous, ceci est un aspect qui risque d’impacter l’activité de la rénovation.

Le mieux serait de donner le crédit d’impôt pour un bouquet ou un séquençage de travaux qui soit cohérent pour atteindre le facteur 4.


Que pensez-vous de l’éco-prêt ?

C’est une démarche qui est positive. Après il faut s’assurer du bon niveau de formation des entreprises. La mention RGE apporte de la reconnaissance mais la qualité du contenu des formations est primordiale pour s’assurer du succès de cette démarche.


Quelle est, selon vous, la clé de votre réussite ?

C’est le fait que l’on fasse de l’animation de réseaux et que l’on fédère autour de nous des entités très différentes qui sont des représentants de la filière du bâtiment.

Nous arrivons également à être précurseur et à tester nos labels sur le terrain.

Enfin, notre club de partenaires d’industriels y joue un rôle important. Ils contribuent à des groupes de travail et nous aident à prendre en compte les interrogations du monde industriel.


Pourriez-vous faire un bilan d’Effinergie pour l’année 2014 ? Quels évolutions et changements pour cette année ?

Il y a trois axes : le bâtiment neuf, la rénovation et puis tout ce qui concerne la vie du bâtiment après sa livraison.

Sur le bâtiment neuf, ce qui est important c’est le déploiement des labels Effinergie + et du Bepos. Ce sont les deux axes prioritaires.

Sur la rénovation, cela va être de regarder comment on va passer des exemples à de la massification. Comment peut-on l’accompagner avec la mise en place du BBC-effinergie rénovation par étape pour converger vers le facteur 4 ?

Enfin pour l’étape suivant la livraison du bâtiment : sortir un guide d’usage qui permette d’accompagner les usagers ; de savoir comment on entretien un bâtiment basse consommation. Cela va être un point important de cette année.

Nous pensons aussi sortir un label Exploitation, qui interviendra après l’étape de livraison du bâtiment.


Quel est, selon vous, l’avenir de votre secteur ?

Que ce soit dans le neuf ou dans la rénovation, il y a de nombreux sujets d’actualités : la loi sur la transition énergétique ; la simplification des normes ; etc… Donc nous voyons bien qu’il y a de nombreux aspects qui sont en jeu, nous sommes un peu dans un moment charnière..

L’enjeu, aujourd’hui, c’est la rénovation du parc existant. Tout en accompagnant la filière au travers de formations, de mises à disposition d’informations, ce que font l’Observatoire et les agréments Effinergie de formation.





*Observatoire des Bâtiments Basse consommation : base de données qui a été créée en 2009 avec le ministère et l’ADEME, et qui a pour objectif de capitaliser sur les projets qui sont construits et certifiés sur la base de nos labels. Son objectif : diffuser de l’information gratuitement auprès des professionnels et du grand public sur les technologies employées : les matériaux, les coûts, les acteurs. Retrouvez toutes les informations sur l’Observatoire des Bâtiments Basse Consommation.

*CSTB : Centre Scientifique et technique du Bâtiment.

*DHUP : Direction de l’Habitat, de l’Urbanisme et des Paysages.

*Facteur 4 : objectif de produire autant de richesse en utilisant quatre fois moins de matières premières et d’énergie.

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